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Le roman rabelaisien appartient-il à la littérature fantastique? Cela nous paraî̂t indiscutable de prime abord, car la chronique fabuleuse des géants est composée de pas mal de matières fantastiques. Mais s'agit-il réellement du genre fantastique? On peut récapituler grosso modo l'essentiel des définitions principales que l'on cite souvent sur le fantastique de la manière suivante : historiquement parlant, le fantastique proprement dit est un concept relativement récent, du moins postérieur à l'établissement du rationnalisme scientifique dans le monde occidental, c'est-à-dire, au plus tô̂t après le Siècle des Lumières. D'après les fameuses définitions de P.-G. Castex et de Tzvetan Todorov, le fantastique se caractérise généralement par “une intrusion brutale du mystère dans la vie réelle” et aussi par l'hésitation “éprouvée par un ê̂tre qui ne connaî̂t que les lois naturelles, face à un événement en apparence surnaturel.”Si l'on applique ces critères au roman rabelaisien, on constatera que celui-ci est plus proche du merveilleux que du fantastique proprement dit. Car contrairement au fantastique, il n'existe pas de frontière nette entre le réel et le surnaturel dans le monde merveilleux par l'intervention du surnaturel reconnu comme tel. C'est le cas des récits mythologiques ou des contes de fées. Chez Rabelais aussi, grâ̂ce à la présence des géants, les événements surnaturels peuvent arriver à tout moment dans le quotidien. Certes, cela ne veut pas dire que le roman rabelaisien est comblé de toutes sortes d'éléments surnaturels. D'ailleurs, la proportion des épisodes traitant du gigantisme reste relativement faible et ces épisodes sont limités presque toujours dans l'enfance des géants et leurs exploits de guerre, c'est-à-dire au début et à la fin des deux premiers livres. Le reste du temps, il arrive parfois que l'auteur lui-mê̂me oublie exprès, croyons-nous, la taille énorme de ses héros à tel point que leurs paroles et actions ne se distinguent guère de celles des gens ordinaires. On dirait que tout s'y passe exactement de la mê̂me manière que dans notre monde. On peut diviser les événements surnaturels dans le roman rabelaisien en les trois catégories suivantes : d'abord, les épisodes relatifs au gigantisme principalement dans le Gargantua et dans le Pantagruel, ensuite, les légendes et les contes folkloriques et aussi les récits sur les superstitions issues des traditions chrétienne ou päenne, qui sont racontés souvent par les personnages-narrants et enfin, les allégories qui servent à faire la satire de la réalité du temps dans le voyage du Quart Livre.