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Le titre faisant allusion au mythe grec, l'aventure de Tiburce, héros de la nouvelle, se développe à l'instar de celle de Jason. Le personnage se montre équivoque : c'est un jeune artiste fort singulier mais en mê̂me temps ordinaire, étant ni heureux ni tout à fait malheureux. Parmi les figures féminines des chefs-d'oeuvre littéraires ou picturaux qu'il adore, le jeune romantique s'éprend d'un type pictural particulier. Cette mise en caractère semble persuader le lecteur du comportement bizarre de Tiburce : sa passion pour la Madeleine de La Descente de croix de Rubens et son désir de Pygmalion à l'égard de cette Sainte blonde. Gautier traite, par une série d'identifications, l'aventure de son héros allant à la recherche d'un substitut de la Madeleine dans le pays flamand de Rubens. Il trouve une nouvelle Madeleine vivante cette fois-ci et non en image, dans un sosie de la Sainte ; ce sosie Gretchen, une blonde, s'approche, dans la psychologie de Tiburce, du modèle de Rubens du XVIe siècle ; l'obsession du jeune artiste se tourne alors vers l'assimilation de lui-mê̂me avec le peintre flamand. Gautier sème deux épisodes antipodaux au dénouement, autour de l'obsession de Tiburce pour le jeu de déguisement et de la révolte de Gretchen qui renverse la situation. Il nous semble que Tiburce voit son désir se réaliser à travers Gretchen déguisée en habit flamand du XVIe siècle tenant la mê̂me pose que la Madeleine. Mais cet acte de déguisement nous montre que la fantaisie de Tiburce caractérisée par 'la nature délaissée pour l'art' est en réalité une autre forme de son obsession ; il nous paraî̂t satisfait à l'idée d'ê̂tre un nouveau Jason face à cette contrefaçon blonde, une équivalente à la toison d'or, tandis que sa vraie toison d'or existe toujours dans le tableau La Descente de croix. Obligée de demeurer en 'doublure' de la Madeleine, Gretchen tombe, dans le déroulement de la nouvelle, en victime du jeu d'identifications pour son amant Tiburce. Le désir de Pygmalion de celui-ci cesse en rencontrant la révolte de Gretchen, et c'est le revirement de son obsession. À travers le rô̂le de Gretchen, se révèle le fait que la passion du héros pour la Madeleine dérive du complexe d'infériorité devant le génie de Rubens. Devenant modèle unique et à part entière pour son amant, elle acquiert enfin une place positive. Son rô̂le ultime, qui nous semble thérapeute, se résume ainsi : lui faire oublier la Madeleine ; lui réintégrer la réalité ; lui faire créer sa propre Madeleine ; enfin lui rétablir le statut d'artiste. Derrière ce jeune artiste pointe, constatons-nous, le portrait de Gautier qui avait tenté une carrière de peintre dans sa jeunesse.
